Mona Court-Picon, Christelle Draily, Freddy Damblon, Nick Debenham, Bjorn De Wilde, Wim Van Neer, Wim Wouters, Michel Toussaint, and Stéphane Pirson (2015)
La Grotte Walou (Trooz): une séquence exceptionnelle du Paléolithique belge
In: Journées d’Archéologie en Wallonnie, Rochefort 2015, pré-actes, ed. by SPW Editions, 117-118.
Située à environ 10 km au sud-est de Liège, la grotte Walou présente une entrée orientée nord-ouest, 25 m au-dessus de la Magne, un tributaire de la rivière du Vesdre. Les fouilles sur le site ont été conduites en deux phases, de 1985 à 1990 (DEWEZ et al. 1993) puis de 1996 à 2004 (DEWEZ 2008, DRAILY 2011), révélant de nombreuses occupations préhistoriques successives. Son importante séquence stratigraphique constitue l’enregistrement sédimentaire le plus complet en ce qui concerne le Quaternaire du karst belge et le plus documenté du Pléistocène supérieur. L’application d’une technique de fouille rigoureuse et une approche interdisciplinaire a contribué à une exploitation optimale des données. L’apport des sciences naturelles a ainsi permis une meilleure compréhension du cadre chronostratigraphique et paléoenvironnemental des occupations (DRAILY et al. 2011, PIRSON et al. 2011, DRAILY et al. 2014). L’étude détaillée de la stratigraphie, le relevé minutieux de tous les vestiges et les études scientifiques permettant de reconstituer l’environnement font donc de la grotte Walou un gisement de référence pour le Paléolithique du nord-ouest de l’Europe.
Sur un total de 45 couches composant la stratigraphie de la grotte Walou, 25 ont livré du matériel archéologique (DRAILY 2011). De haut en bas, soit du plus récent au plus ancien, des traces de Néolithique (couche A2) et de Mésolithique (couches A4 et A5) ont été observées. La grotte a également révélé plusieurs occupations du Paléolithique supérieur : Federmesser (couche B1), Gravettien (couche B5) et Aurignacien (couche CI-1). La partie inférieure de la séquence, qui recouvre le dernier interglaciaire et le début du glaciaire Weichsélien, comprend 9 occupations moustériennes ; 6 couches remaniées ont également fourni des artéfacts de cette culture. Une dent d’homme de Neandertal a été découverte dans la couche CI-8, qui contient la plus riche occupation moustérienne du site. Cette découverte confère à Walou une importance toute particulière du fait de la rareté des fosiles néandertaliens retrouvés tant à l’échelle de l’Europe qu’à celle de la Belgique. L’ensemble du matériel lithique a été produit à partir de silex très probablement situé à proximité de la grotte. Seules les occupations gravettiennes et aurignaciennes ont livré d’autres matériaux anthropiques : artéfacts en bois et ossements d’animaux (sagaies en bois de renne, croches de cerf perforées), mais aussi artéfacts minéraux non utilitaires.
De nombreux restes fauniques ont également été retrouvés : ours, hyène et lion des cavernes, cheval, renard, bison/aurochs, rhinocéros laineux, cerfs élaphe et mégalocéros, renne, loup, mammouth, chamois, lièvre, blaireau, panthère, chat sauvage, marmotte, castor, lynx, putois, hermine, chevreuil, martre ou fouine, sanglier, bouquetin, mais aussi petits rongeurs et quelques oiseaux. Il est vraisemblable qu’une partie des restes d’herbivores découverts résulte des activités de chasse des hommes préhistoriques, sans qu’il ne soit possible d’identifier la part de celles-ci vis-à-vis des apports par les carnivores. L’étude des restes de poissons a révélé que la pêche a eu lieu sur le site et que les même espèces ont été consommées, aussi bien au cours du Paléolithique moyen que pendant le Paléolithique supérieur et le Néolithique (DRAILY et al. 2011, DRAILY et al. 2014).
Le paléoenvironnement de chaque couche du site a pu être appréhendé par l’étude des sédiments et des vestiges de la flore (grains de pollen et spores, fragments de charbons de bois). Ces études permettent de déterminer le climat et le type de végétation environnant la grotte. Douze améliorations climatiques ont été identifiées tout au long de la séquence par plusieurs marqueurs géologiques. L’enregistrement pollinique révèle également une alternance d’assemblages spécifiques de steppes froides et sèches et de milieux plus boisés se développant lors de phases plus chaudes et humides. Chaque paléosol indicatif d’une amélioration climatique est caractérisé par des spectres plus ou moins riches en pollen et trachéide de pin, alors que les dépôts loessiques remaniés livrent des assemblages riches en taxons herbacés avec une grande proportion d’éléments steppiques (DRAILY et al. 2011, DRAILY et al. 2014).
Bibliographie
DEWEZ M. (2008). Recherches à la grotte Walou à Trooz (Belgique). Second rapport de fouille, Oxford (British Archaeological Reports, International Series, 1789).
DEWEZ M., COLLCUTT S. N., CORDY J.-M., GILOT E., GROESSENS-VAN DYCK M.-C., HEIM J., KOZLOWSKI S., SACHSE-KOZLOWSKA E., LACROIX D., SIMONET P. (1993). Recherches à la grotte Walou à Trooz (province de Liège, Belgique). Premier rapport de fouille, Liège (Société Wallonne de Palethnologie, 7), 81 p.
DRAILY C. (2011). La grotte Walou à Trooz (Belgique). Fouilles de 1996 à 2004, vol. 3, L’archéologie, Etudes et Documents, 22, 332 p.
DRAILY C., COURT-PICON M., DAMBLON F., DE WILDE B., JUVIGNÉ E., PIRSON S., STEWART J., TOUSSAINT M., VAN NEER W., WOUTERS W. (2014). La grotte Walou, un site exceptionnel du Paléolithique, Institut du Patrimoine wallon, Carnets du Patrimoine, 120, 40 p.
DRAILY C., PIRSON S., TOUSSAINT M. (2011). La grotte Walou à Trooz (Belgique). Fouilles de 1996 à 2004, vol. 2, Les sciences de la vie et les datations, Etudes et Documents, 21, 241 p.
PIRSON S., DRAILY C., TOUSSAINT M. (2011). La grotte Walou à Trooz (Belgique). Fouilles de 1996 à 2004, vol. 1, Les sciences de la terre, Etudes et Documents, 20, 208 p.
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