Philippe Lefèvre, Caroline Polet, Alexandra Boucherie, François Beauthier, and Jean-Pol Beauthier (2024)
Intérêt de l'étude de la base du crâne en anthropologie médico-légale. I. Le foramen magnum.
ANTHROPOLOGICA ET PRAEHISTORICA, 133.
Le foramen magnum (FM), structure particulière de la base du crâne par sa robustesse et sa position anatomique privilégiée, constitue une structure protégée en cas de fragmentation de la tête dans diverses circonstances (explosion, incendie, conflits armés et violences interpersonnelles). Dans ces situations particulières, le FM peut présenter un intérêt en anthropologie médico-légale. Si le FM a été largement étudié, son utilisation en médecine légale était quelque peu tombée en désuétude.
Il était donc intéressant de revoir quelles étaient, in fine, les diverses possibilités d’utilisation du FM, leurs résultats et leurs précisions dans le domaine spécifique de la médecine légale. La conception de cet article repose sur une révision bibliographique non exhaustive des méthodes utilisant le FM et applicables en anthropologie médico-légale. Cette révision comporte une soixantaine d’articles, sur des populations du XVIIIe au XXIe siècle issues d’Europe, d’Afrique, d’Amérique et d’Asie.
Si les formes du FM furent répertoriées selon le sexe ou les populations, les résultats obtenus furent très variables avec une reproductibilité relativement faible. La forme « ovale large » semble la plus fréquente chez les deux sexes. Outre les mensurations classiques de longueur, largeur, circonférence et aire du FM, certains auteurs y ont associé des mensurations des condyles occipitaux. Les différentes fonctions discriminantes permettent actuellement de classifier correctement entre 70 et 85 % les sexes et les origines biogéographiques des échantillons de contrôle. Peu d’études portent sur l’estimation du sexe chez les immatures dans cette région du crâne. Les fonctions discriminantes disponibles ont permis un taux moyen de classification globale correcte qui atteint 76 %. Ce résultat reste néanmoins problématique car les équations ne sont basées que
sur un nombre très limité d’individus. La sénescence ne semble pas affecter, indépendamment du sexe, les variables morphométriques de la base du crâne. Les corrélations entre les mensurations du FM et la stature se révèlent aussi très faibles. La seule constante retrouvée dans toutes ces études consiste en la différence significative des mensurations du FM qui sont plus grandes chez les individus masculins que féminins. L’utilisation des mensurations du FM en tant qu’indicateur du dimorphisme sexuel ou de l’origine biogéographique peut donc se limiter à des crânes fragmentés et/ou incomplets et lorsqu’aucune autre méthode plus efficace ne peut être appliquée (estimation du sexe selon les caractéristiques morphologiques et anthropométriques de l’os coxal, de la tête osseuse ou encore des pièces osseuses de type long).
Athropologie forensique; foramen magnum; morphométrie; estimation du sexe; origine biogéographique; stature; sénescence.
Document Actions