Depuis plusieurs années, la microtomographie à rayons X calculée par ordinateur (CTscan) a pris une place importante dans les laboratoires de paléontologie des vertébrés, jusqu’à remplacer dans certains cas les méthodes traditionnelles de préparation mécanique, pour l’étude de spécimens fossiles. Ces CTscans permettent aux chercheurs d’étudier des caractères autrement impossibles à observer, tout en préservant au maximum le spécimen de toute technique intrusive. Cependant il est souvent nécessaire d’effectuer tout de même une préparation physique du fossile, combinant ainsi les techniques virtuelles et mécaniques afin d’améliorer l’étude d’un spécimen ou encore pour permettre l’exposition de ce dernier. Le crâne de crocodilien de cette étude provient du site paléocène moyen de Qianshan dans la province d’Anhui en Chine. Il a été découvert lors des expéditions sinobelges de l’Institut royal des Sciences naturelles de Belgique (IRSNB) qui ont eu lieues de 2008 à 2011. Seule la face ventrale du crâne a été dégagée, présentant un os très fin, fragile et fragmentaire, ainsi que quelques dents encore en position. La finesse de l’os, additionnée à des sutures très marquées suggère un individu juvénile. La face dorsale du crâne étant complètement recouverte par la matrice gréseuse, le spécimen a été scanné à l’aide du micro CTscanner EasyTOM 150 de l’IRSNB, ceci afin de le manipuler virtuellement dans son entièreté, pouvoir l’étudier et aussi le visualiser avant sa préparation physique. En effet, la fragilité des os et le manque de visibilité de la face dorsale rendent la préparation très risquée et demandent un temps considérable. La segmentation virtuelle a été réalisée sur le logiciel Materialise Mimics 19,0 (x64) (Materialise NV, Leuven, Belgique) pour séparer l’os de la matrice puis pour modéliser le crâne en trois dimensions. Le contraste entre les os et la matrice est par endroit très faible (dû à un os très fin et une matrice siliceuse) et il a fallu environ une quinzaine d’heures de travail pour obtenir une reconstitutioncomplète du crâne. Au terme de cette segmentation, deux os périphériques au crâne se sont relevés appartenir à une mandibule (angulaire et surangulaire) montrant une large fenêtre mandibulaire. D’autres fragments d'os isolés du crâne ont aussi été identifiés virtuellement dans la matrice. La segmentation du crâne en luimême a révéléun crâne relativement bien conservé, le côté droit étant fragmentaire. Les coupes tomographiques ont également mis en évidence de nombreuses fissures dans la roche, pour beaucoup traversant de part en part le crâne. Toutes ces informations récupérées en amont de la préparation ont permis de faire une analyse complète du travail physique à effectuer et de planifier la meilleure approche possible (localiser les caractères diagnostiques importants à dégager, les fractures dans l'os ou les fragments isolés, stabiliser les fissures ou encore tenir compte de l'épaisseur de l'os). Le tout facilite grandement la préparation et diminue les risques d’endommager le spécimen. Cette étude de cas montre déjà l’intérêt de telles technologies pour les chercheurs mais souligne à quel point cette nouvelle technique de préparation est utile dans la boite à outils déjà bien grande des préparateurs.
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RBINS Staff Publications 2018
Entre les mois de mars et de juillet 2021, une opération de fouilles archéologiques préventives s'est déroulée sur une parcelle située à l'emplacement de l'ancienne abbaye du Val des Écoliers, dans le centre-ville de Mons. Ces fouilles, imposées à l'aménageur par l'AWaP, ont été motivées par le bon état de conservation des vestiges en sous-sol et par la menace que faisait peser sur eux la construction d'un immeuble de bureaux doté d'un parking de deux étages en souterrain. En raison de la cohabitation entre les aménageurs et les archéologues, la zone de fouille a été limitée à une bande de terrain d'environ 60 m sur 12 m, située le long de la rue André Masquelier. Cette emprise a été déterminée en se basant sur les copies d'un plan du xviiie siècle, avec pour objectif de fouiller la majorité des vestiges bâtis de l'abbaye conservés dans la parcelle. Les bonnes relations entretenues avec les équipes de construction permirent d'enregistrer ponctuellement des informations supplémentaires dans le reste de la parcelle. L'opération archéologique, confiée via une procédure de marché public à l'asbl Recherches et Prospections archéologiques (RPA) s'est déroulée en deux phases. La première, de la fin du mois de mars au début du mois de mai, a entraîné la mise au jour d'une partie de la galerie méridionale du cloître, d'une partie du réfectoire, d'une partie de la cuisine et de pièces qui y sont liées, et la découverte de divers espaces de circulation et de niveaux correspondants à des espaces ouverts, comme le préau du cloître et des jardins. Les délais prévus ont imposé une fouille partielle, en sondage, de ces espaces. La superposition de multiples niveaux de sols et la mise établi que cette partie des bâtiments de l'abbaye a été occupée et transformée entre le xive et le xixe siècles. La présence de sépultures médiévales bien conservées dans la galerie du cloître a motivé de nouvelles négociations entre l'AWaP et les aménageurs, au terme desquelles il a été décidé de fouiller l'intégralité de la zone du cloître jusqu'au retrait de la totalité des sépultures. La seconde phase de l'opération s'est alors déroulée, entre le début du mois de mai et la fin du mois de juillet. Elle a consisté à décaper le prolongement de la galerie méridionale et une partie de la galerie orientale du cloître, à enregistrer les vestiges bâtis dans cette zone et à fouiller les sépultures, superposées sur plusieurs niveaux. Pour ce faire, l'équipe a été renforcée d'anthropologues de l'asbl RPA et de l'Institut des Sciences naturelles de Belgique afin de procéder dès le terrain à l'enregistrement des données archéothanatologiques et biologiques. Les galeries du cloître ont livré 54 sépultures contenant des cercueils de bois. Ces derniers sont généralement faits de planches clouées sur un fond de plan trapézoïdal et sont dotés d'un couvercle plat ou en bâtière. Les défunts ont été inhumés en décubitus dorsal, les jambes allongées, les bras le long du corps avec, la plupart du temps, les avant-bras croisés sur le ventre ou sur le bassin. L'état de conservation, assez exceptionnel, ainsi que l'analyse taphonomique ont permis d'aller plus loin dans la caractérisation des pratiques funéraires, avec la présence de litières de paille, de coussins céphaliques, d'éléments vestimentaires et de restes de chaussures en cuir. Une première analyse du recrutement montre que cet espace d'inhumation était avant tout réservé aux adultes, puisqu'il n'y a pas d'enfant et seulement deux ou trois adolescents. Si les hommes sont plus nombreux (21), les femmes sont également bien représentées (10). L'étude de la stratigraphie du cloître et l'expertise de la céramique indiquent que les sépultures seraient surtout datées des xive et xve siècles. Cette datation est soutenue par la typologie des cercueils et les modalités d'inhumation.
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RBINS Staff Publications 2022